Tourisme automobile – un moyen de transport devient une attraction touristique
Aujourd’hui, dans un contexte où le tourisme fait face à une multiplication des attentes des touristes, des acteurs provenant d’un secteur tout autre, celui de l’automobile, ont réussi à faire de leur marque une véritable attraction touristique. Le tourisme automobile par la réalisation de parcs à thème: ainsi les fabricants de voiture ont créé de véritables expériences touristiques autour de leur marque.
En Allemagne, il existe différents exemples : Mercedes-Benz Welt à Stuttgart, Opel Life à Rüsselsheim, BMW Welt à Munich et le plus important, qui fera l’objet d’une étude de cas dans cet article : Autostadt de Volkswagen à Wolfsburg.
Par cette étude de cas, il s’agira de mettre en lumière comment une marque de voiture a réussi à développer un parc d’attractions devenu une véritable référence touristique. Comment a-t-il permis de développer le tourisme dans une région faiblement touristique ? Surtout, quelles sont les bonnes pratiques du parc en matière de marketing touristique expérientiel ? Enfin, existe-t-il un contre-exemple de tourisme automobile n’ayant pas fonctionné et pourquoi ?
L’exemple d’Autostadt , la « ville auto » de Volkswagen
Le 18 juillet 2012, le parc d’automobile « Autostadt » au nord de l’Allemagne a pu fêter son 25 millionième visiteur depuis son ouverture en 2000. Le parc d’attractions enchante les visiteurs de tout le pays ainsi que de l’étranger, par ses attractions et ses mises en scène dédiées à la découverte et à l’explication du phénomène automobile (www.autostadt.de).
Or, à la base, l’Autostadt devait servir à autre chose. Dans un contexte de compétition accrue, où les marques d’automobiles n’arrivent plus à se distinguer par le simple physique et les prix de leurs produits, Volkswagen chercha à renforcer l’attachement émotionnel à sa marque de la part des clients. En effet, lors de leur venue pour chercher leurs nouveaux véhicules, les clients voient non seulement une vitrine du savoir-faire du groupe, mais ils peuvent vivre toute une journée de divertissement avec toute la famille.
L’emblème de l’Autostadt : Les deux tours de 48 m où les voitures prêtes à être livrées sont stockées. Ici, elles témoignent d’une mise en scène entre eau, feu et lumières, que l’Autostadt a produite et chorégraphiée elle-même. Elle a contribué à faire venir 368.000 visiteurs uniquement au mois de juillet 2011 (Autostadt.de, 01/05/2012).
L’Autostadt c’est :
- 25 % des visiteurs qui viennent pour venir chercher leur voiture, contre 75 % qui cherchent avant tout l’expérience automobile, les mises en scène et l’offre éducative (Presseportal, 2012).
- 2,27 millions visiteurs en 2011 (Autostadt.de, 05/01/2012) – Un centre de livraison qui est devenu une des destinations les plus populaires en Allemagne, et un musée d’automobile le plus visité au monde
- Dans les premières années, la majorité des visiteurs parcouraient des distances de moins de 80 km pour visiter l’Autostadt (Presseportal, 2012). Aujourd’hui, 60 % viennent de plus de 80 km (Presseportal, 2012).
- La durée moyenne de séjour est passée de presque 4 h en 2004 à 5 h 30 en 2012. (Presseportal, 2012)
L’Autostadt et le développement de l’offre touristique avoisinante
Autostadt s’est bien intégrée dans le réseau touristique : des offres combinées (visit-hannover.com), des tarifs de billets de train spéciaux Autostadt, ainsi qu’un hôtel 5 étoiles Ritz-Carlton sur le terrain même qui sert tant pour les visiteurs que pour des congrès (Andreas Fedderson, 2004).
Quelles sont les bonnes pratiques en matière d’expérience touristique ?
- Surprendre et créer des émotions
Partout au travers du parc s’intègre la dramaturgie : dans les aménagements architecturaux, environnementaux, et dans les mises en scène des marques. L’architecture reflète leurs valeurs individuelles sans que le logo apparaisse. Le visiteur vivra ainsi des moments de dépaysement et de découverte qui mèneront son chemin.
- Lier le monde imaginaire et ludique au monde sérieux de tous les jours
La force du parc se trouve dans la création d’expérience et d’émotions autour des sujets qui nous importent tous. Ainsi, il ne se présente donc pas en tant que lieu de divertissement à premier abord, mais à travers des histoires réalistes et mythiques, Volkswagen fait réfléchir et travailler les visiteurs sur des aspects techniques, économiques, sociaux et culturels de la mobilité.
- Attirer une cible la plus large possible
Grâce à un programme très développé d’expositions, de festivals, de semaines à thèmes, d’ateliers éducatifs et de stations interactives, Volkswagen crée une connexion entre ses produits réels et le design, le cinéma, l’art, l’architecture et l’art de vivre. En s’adressant ainsi à une cible la plus large possible, Autostadt suit la tendance actuelle du tourisme de courte durée en famille. De plus, cela correspond parfaitement à son image de marque : la voiture du peuple. En effet, la voiture, c’est un produit pour tout le monde, même pour ceux qui ne s’y intéressent pas.
- Faire participer et faire de l’éducation une attraction touristique
Au-delà de ses lieux de découverte, d’interaction et d’éducation dans le cadre de ses expositions permanentes, Autostadt a su profiter de ces ressources-compétences afin de pousser son offre encore plus loin. Ayant en partie été reconnu comme lieu de formation par le ministère de l’Éducation de la région Basse-Saxe, le parc propose aujourd’hui de nombreux programmes et projets éducatifs autour de la mobilité, conçus pour les tout petits jusqu’aux seniors, voir des stages artistiques dans une académie interne qui y prépare ses talents pour les festivals.
- Développer des offres thématiques pour faire revenir à tout moment
Des sujets adaptés aux différentes saisons permettent d’exploiter ce lieu tout au long de l’année et de lutter ainsi contre saisonnalité. Par exemple, un paysage alpin a su attirer entre décembre 2011 et janvier 2012 quelque 460.000 visiteurs. (Presseportal, 2012)
- Communiquer sur les valeurs de la marque plutôt que sur ses produits
L’offre touristique de l’Autostadt s’est transformée en une offre secondaire du groupe où la communication de marque ne s’impose pas même si elle est sous-jacente. Pour preuve, les logos du groupe Volkswagen sont utilisés avec parcimonie et le musée contient plus de 50 marques de toutes les générations de manière égale. Ainsi, le parc et par conséquent Volkswagen gagnent une image sympathique et honnête auprès de la clientèle (Focus, 2009).
Opel, un contre-exemple
Si Volkswagen, BMW et Mercedes arrivent à retenir et fasciner leurs visiteurs, la réalisation du parc d’Opel a pu montrer la sensibilité d’un tel projet : manque de visiteurs et fermeture au bout de 2 ans (2001). Avec des coûts d’investissement de 60 millions d’euros, le parc présentait à ses visiteurs un monde virtuel de voiture, du divertissement de haute technologie avec des simulations, un cinéma 3D et une exposition de voitures anciennes (Spiegel 2001 : 66). Quelles raisons peuvent alors avoir mené à cet échec ? On nomme des critiques telles que des thématiques trop commerciales, un manque d’authenticité, une orientation trop proche au concept de Disney manquant toutefois de la valeur expérimentale, ainsi que la sous-estimation des besoins des consommateurs (Seßler, 2007 ; Feddersen, 2004).
Conclusion
À la naissance de l’Autostadt aussi, des détracteurs demandaient si, face à une conjoncture instable, on aurait peut-être du faire d’autres investissements plus pertinents qu’un temple d’autopromotion du groupe. Aujourd’hui, il est évident que l’argent n’aurait pas pu être mieux investi : création de centaines d’emplois, valorisation touristique et culturelle de la région de Wolfsburg et développement d’une communication de marque et de marketing relationnel profond au-delà de la clientèle partisane.
Le mariage entre consommation et tourisme est un concept qui fonctionne ! Surtout si la marque d’automobile a plus à offrir aux consommateurs que ses propres produits, mais des valeurs et une expérience. Développer une destination touristique représente pour un fabricant d’automobiles un projet de diversification latérale extrêmement risqué, car très éloigné de son cœur de métier. Il est pour cela primordial de faire confiance à de véritables professionnels du tourisme, voir, comme dans le cas de l’Autostadt, du spectacle, du cinéma et de la formation. Le parc ne doit surtout pas tenter de vendre, mais de fasciner par son monde ludique, expérimental et éducatif qui se découvre chaque fois différemment dans sa mutation permanente.
Article coécrit par Yohann RIPPE et Carolin PELZ
Sources
Andreas Feddersen (2004) Strategien der Inszenierungen: Unternehmens-Erlebniswelten zwischen künstlicher Ablenkung und Authentizität am Beispiel Autostadt Wolfsburg, GRIN Verlag.
Seßler, Pirmin (2007). Touristische Dienstleistungen von Automobilproduzenten. GRIN Verlag
Autostadt (2012). Besucherrekord in der Autostadt, Communiqué de presse, 05 janvier 2012
Presseportal (2012). 25 Millionen Gäste in der Autostadt in Wolfsburg, 18 juillet 2012
Focus (2009). Wie VW, Mercedes und BMW Kunden locken, 20 juillet 2009
Wolfsburger Allgemeine Zeitung (2011). Große Premiere in der Autostadt, 01 juillet 2011
Wolfsburger Nachrichten (2012). Qualifiziertes Lernen ist nicht leicht, 18 novembre 2012
Spiegel (2001). Aus für Opel Live. Vol. 02/2001, p. 66.
Site web Visit Hannover
Site web Autostadt
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